Marie-Cécile, entre sirènes et éducation – Acte 2


Notre relation avec Marie-Cécile avait merveilleusement commencé par cette nuit d’amour généreuse et sincère. Elle se prolongea par une suite d’entrevues chez elle, et quelques week-ends chez moi.

Que puis-je dire sur cette période, à part que c’était bien ? Peut-être aussi que c’était simple. Mais il me faut l’expliquer.

Marie-Cécile n’était pas simple à gérer parce que notre entente coulait de source. Elle était facile à gérer parce que, après quatre ans passés avec une femme complexe, masculine et solitaire comme Virginie, je me retrouvais avec une femme ayant strictement toutes les attitudes féminines habituelles que j’avais si longtemps étudiées. Je lisais en elle comme dans un livre ouvert, et slalomais entre ses humeurs et simagrées avec l’aisance du champion olympique. Notre relation était simple car j’avais révisé des années entières pour cette épreuve, et je réalisais un sans faute.

Cela conduisit, paradoxalement, droit à notre perte.

Pour le comprendre, il me faut rajouter un détail crucial. Marie-Cécile m’avait rencontré quelques mois seulement après une rupture violente. Elle venait de se séparer d’un potentiel homme de sa vie, qui avait finalement choisi sa carrière plutôt qu’une vie de famille. Elle avait alors quitté cet homme et un pays étranger pour rentrer à Paris. Autant dire que notre rencontre intervenait bien trop tôt dans son processus de reconstruction.

Notre entente sensuelle ainsi que ma capacité à la comprendre la perturbait évidemment. Marie-Cécile était tiraillée entre un besoin classique de dévoiement post-rupture et la conscience vague d’avoir rencontré au moins aussi bien que son ex.

Elle était également tiraillée, de façon plus profonde et certainement depuis bien plus longtemps, entre son éducation de bonne famille de province et les étoiles dans les yeux d’une vie de trentenaire parisienne. Des étoiles que lui mettait notamment la copine de son frère, une conne mondaine de la capitale qui fricotait avec le gratin du luxe en tapinant à un haut poste inutile chez L’Oréal.

Ce double tiraillement l’amènerait inévitablement à remettre en question notre relation. En attendant qu’elle se décide, je profitais de nos moments.

Il y eut ce week-end à Bandol, dans son appart familial. Un week-end divin à profiter des bonheurs de cette ville que nous avions rejoint avec ma décapotable, que nous arpentions en scooter, en s’interrompant l’après-midi pour une sieste après avoir baisé, la fenêtre ouverte pour faire profiter toute la résidence de ses gémissements délicieux. Elle aimait que nous reproduisions tous les clichés du beau couple en vacances. Et honnêtement, ça me faisait du bien aussi. Nous étions beaux tous les deux.

Il y eut ce week-end à la montagne. Nous avions soigneusement évité la pénible randonnée pour nous consacrer à d’autres activités moins dégradantes pour une fille de la capitale : des verres en terrasse en profitant des rayons perçants du soleil, des restaurants simples mais pittoresques. Le samedi, elle avait acheté un exemplaire de Elle pour vérifier qu’elle correspondait bien aux « tendances de l’été ». Elle me dit avec une certaine fierté en avoir « huit sur dix de juste ». Cette relation était décidément reposante, et je ne me lassais pas de la contempler, qu’elle soit adossée sur sa chaise à la terrasse du bar d’altitude, la tête penchée en arrière pour profiter du soleil avec ses grandes lunettes sombres de star des années 70, ou allongée sur le ventre en train de faire la sieste après nos séances torrides, la couette seulement posée sur ses jambes, dévoilant dans le clair-obscur de la chambre son cul extraordinaire, sa descente de reins et ses omoplates saillantes de nageuse.

Nous aurions pu devenir un très beau couple avec Marie-Cécile, si seulement elle avait eu dix ans de maturité en plus. Il aurait fallu qu’elle fasse son overdose de parisianisme afin de n’en garder que le glamour et la classe véritable, tout en retrouvant les fondements sains de son éducation. Mais elle avait encore du chemin à parcourir.

En attendant l’inévitable chute, je profitais donc. Et c’était bien. C’était déjà bien.